93, Terre de contrastes ...

Même à Bobigny, Il y a un office du tourisme. C'est dingue qu'on puisse imaginer que quelqu'un vienne faire du tourisme dans un endroit comme la Préfecture du 93 ... Ici les gens viennent plutôt pour les permis de séjour ou au Palais de justice. Les appareils photos ne sont pas bien vus et il y a intérêt à se faire discret pour éviter les embrouilles. Une fois je suis venu passer une journée au service des étrangers à la Préfecture pour un reportage.



J'ai découvert, ce jour-là comment on peut humilier des gens en les forçant à commencer à faire la queue à 3-4 heures du matin pour avoir un numéro d'ordre bien placé (certains dorment devant la porte). J'ai vu des gens les larmes aux yeux, car ils venaient de recevoir leur carte de séjour, récupérant du même coup leur dignité. J'ai vu des jeunes garçons insulter des employés administratifs parce que il manquait des pièces dans le dossier de leur père qui ne parle pas français: "Enculé de ta race ! C'est la sixième fois qu'on vient !! Je nique ta mère !!!". J'ai vu le père dire à l'oreille du garçon: "Tais-toi ! Tu vas nous attirer des ennuis !" ... C'est comme-ça la Préfecture de Bobigny. En fait il y a toujours comme une incompréhension dans l'air ... Du point de vue architectural, certains endroits me font penser à la Roumanie des années 70. Cette banlieue me fend le coeur.

Centre commercial, Centre culturel

Bon bien sûr le Centre Commercial "Bobigny 2" attire un max de monde. Aujourd'hui, j'ai garé ma bagnole au parking du centre. C'est gratuit pendant 2 heures et puis, Je me suis déjà fait tirer des trucs dans ma caisse à St-Denis ou ailleurs, alors je fais gaffe quand même. A 15h00 le Bar-PMU des deux provinces fait le plein. Les gens se pressent pour faire valider leurs tickets de jeu au courses. Ils espèrent toujours gagner et sortir de la merde, j'imagine. J'espère qu'ils jouent pas les allocs.

Low cost à tous les étages

Plus loin, des jeunes se saluent en se tapant dans la main et après sur le coeur. C'est les filles d'un côté, les garçons de l'autre. Pas de mixité dans les groupes. Les jeunes filles sont très maquillées et portent des tenues moulantes que la morale de leurs grands frères réprouve. En fait, elles ressemblent étrangement au cagoles de Marseille. Elles déambulent dans des magasins de Fashion low cost aux enseignes inconnues, au milieu des chaussures chinoises à 10€. Ici, même la bouffe est low cost, surtout la bouffe. On a le choix entre 4 kilos de cuisses de poulet pour 8€ et le MAC-DO à l'entrée, ou en temps de crise, on mange pour un bon rapport qualité prix parait-il.

"T'es floue, tu t'en fous ..."

Je vais photographier un type dans une grande administration qui est le tuteur d'une jeune fille qui fait partie des "minorités visibles" comme on dit aujourd'hui. La jeune fille en question est revenue sur son accord, elle ne veut plus poser pour cette photo. Elle a pensé que cet article la désignerait du doigt comme quelqu'un qui est traité à part ... Pas comme les autres quoi. Ou alors, sa famille lui a interdit de se faire photographier dans un journal, on ne sait pas. J'espère sincèrement pour elle que la première supposition est la bonne. Le type appelle une collègue dans le bureau voisin pour jouer la stagiaire: "Tu t'en fous, tu vas être de dos et floue !...". Je fais les photos et je me casse rapidement pour rentrer à Paris. En arrivant, je m'arrête pour faire des courses à Barbès. Quand ils parlent des banlieues, les politiques parlent des "quartiers". Moi , mon quartier c'est Paris.

F.Piglet