lundi 12 octobre 2020

Combien gagne un photographe ?

Annonce Pôle emploi / octobre 2020


Juste à l'heure où NIKON vient d'annoncer l'arrêt de la production du F6, l'idée selon laquelle les photographes pro se sont goinfrés pendant des décennies à l'époque de l'argentique est encore assez largement répandue chez les imbéciles. Heureusement, depuis que le numérique est la solution à tous les problèmes, le vulgum pecus peut accéder librement et sans frais (selon lui) à la reproduction d'une réalité étriquée et sans relief, au travers du capteur minuscule de son smartphone dont il est l'esclave débile. Il peut ainsi se constituer son petit panthéon photographique personnel en regardant le monde à travers un écran de minus.

Mais combien gagne un photographe de métier aujourd'hui, s'il en reste quelques uns ? Ça c'est la question qui travaille les mecs qui aimeraient bien le devenir. Ce serait tellement facile avec le numérique qui permet à n'importe qui de faire des bonnes photos en gagnant plein de fric.

Eh bien, j'écoutais le fameux reporter de guerre Patrick Chauvel sur Franceinfo (Prix Bayeux-Calvados), parler des conditions dans les lesquelles il avait travaillé sur la chute de Baghouz en Syrie. Au delà du talent et de la destinée inouïe de ce type de 71 ans qui continue à arpenter les pays en guerre encore aujourd'hui, après 50 ans de carrière, on remarque sa lucidité implacable, quand il expose en 7 minutes le naufrage du reportage de guerre:

Mandaté par Paris-Match, il est payé 5000 euros pour ce travail qui se transforment en 3 800 euros une fois payées les cotisations sociales (appelées improprement charges pour culpabiliser les salariés), puis en 800 euros une fois payés les frais de reportage en Syrie (Hôtels de luxe et repas gastro midi et soir). Résultat net: 800 euros pour 6 semaines de travail. Moins de 20 euros par journée de travail avec énorme prise de risques. Alors pourquoi continuer dans ces conditions ? Je le sais depuis toujours. L'argent n'est pas un moteur ou un argument comptable pour les vrais photographes de conviction, qui pratiquent ce métier dans le but de témoigner. Ils sont souvent talentueux, donc rares et pas chers. Ce qui n'est pas le moindre des paradoxes. D'ailleurs la plupart des gens qui exercent le métier de photographe comme-moi, n'auront qu'une destinée minable qui ne laissera aucune trace, comparé à eux. Nous sommes pourtant, je l'affirme, à l'aube d'un nouvel âge d'or du photo journalisme. Tout simplement parce que la liquéfaction de l'état face aux problèmes de notre temps va engendrer un certain nombre de conséquences fâcheuses, à court terme, qui seront propices à l'exercice de notre métier.

Pourtant, je gagne plus que Patrick Chauvel (sur 6 semaines, c'est pas difficile), mais ça me fait une belle jambe et qu'est-ce que je me fais chier parfois. Pas tant dans mon travail, qu'en lisant les échanges surréalistes de gens qui se disent du métier et qui ergotent pendant des heures sur le statut d'auteur, les prélèvements de l'URSAFF, les cessions de droits, les contrats et les durées d'utilisation d'images à priori sans grand intérêt. 

Dans la presse, cela fait longtemps qu'on en est plus là. Et il faut se lever de bonne heure pour se faire payer la moindre ré-utilisation de ses photos et même se faire payer tout court. Les éditeurs de presse considèrent que payer une fois, c'est payer pour toutes les fois. Et quand ils se conforment à la loi, qu'ils payent les collaborations en salaire et signent un accord collectif sur les repasses, c'est un miracle et c'est qu'on est à Lourdes. Ici, "Paye ta Pige", vous pouvez trouver quelques exemples édifiants sur les tarifs couramment constatés dans le secteur de la presse et encore, on ne parle pas des délais de paiement. Pour ma part, je vais m'avancer un peu, je considère que travailler à moins de 300€ bruts en salaire prix ultra plancher (ce qui correspond à 450€ environ pour les autres modes de règlement des statuts pourris) sur une prise de vue qui va t'occuper une journée et plus avec la post-prod, relève du suicide professionnel. Même si sur une collaboration de longue durée et c'est très pénible à dire, il faut toujours prendre en compte le volume de travail effectué dans l'année. Mais on ne travaille pas à l'heure ! Malheureusement, pour beaucoup de photographes sans expérience, la rémunération est considérée comme un problème secondaire et non prioritaire. Si assez rapidement, ils ne sont plus là pour en parler en grandissant un peu, il en arrive de nouveaux tous les jours qui entretiennent la spirale infernale. Même s'ils sont nuls, il maintiennent par procuration un forme de pression sur les tarifs qui ne veulent plus rien dire. 

Alors, tu veux toujours devenir photographe pauvre con ?

Frozen Piglet






12 commentaires:

Anonyme a dit…

A ce propos il faut écouter Patrick Chauvel dans "A voix nue" de la semaine dernière, sur le site France Culture. Ça décoiffe !

Joe Pesci a dit…

C'est assez bien résumé

Maryline a dit…

Mon petit Piglet, je dois t'avouer une chose. Je suis follement amoureuse de toi depuis des années.
J'aime tout chez toi. Surtout ta petite queue en tire-bouchon !

NATUREL PHOTOS OUEST a dit…

Le ton et les propos sont assez insultants ( pauvre con ) . De plus , cela ne parle que de photographe de presse alors que le métier est très diversifié ( un photographe de presse n'a pas les mêmes contraintes qu'un photographe de mariage , de voyage et des autres spécialités de la photographie sans parler des possibilités de concurrence très différentes selon les métiers . Chaque métier de la photographie a des revenus différents et réduire ça à un seul métier est absurde . Selon les statuts , les contraintes fiscales sont différentes sans parler de la concurrence loyale ou déloyale ( certains photographes amateurs réalisent des mariages par exemple ) qui fixent les tarifs donc les revenus par la même occasion .

Anonyme a dit…

Les autres "spécialités" de la photographie, j'en ai rien à foutre.
Je préférerais crever que de faire des photos de mariage. La concurrence, je m'en bats les steaks.
J'adore les insultes et l'absurdité. Le photo journalisme, n'est pas un métier, c'est une vocation.
Donc l'avis de tel ou tel sur ce que j'écris, je men tamponne totalement.
Hasta la vista baby

Frozen Piglet

Anonyme a dit…

Le numérique c’est super mais mince, depuis son apparition tout est devenu de la merde, on peut élargir à pleins de trucs…
En musique c’est pareil, le royaume des amateurs (le fameux album enregistré dans la cuisine ( je parle pas des punks ou du low fi hein…)), résultat des courses: des mecs et des poulettes qui savent pas jouer en place, qui savent pas arranger, qui font de la merde et qui se racontent des histoires.
Bon ok, il y a des chefs op qui sortent des images de malades avec des cameras à 3000 balles c’est sur et je kiffe pas mal en pratiquant mon taf d’étalonneur sur DA Vinci resolve, t’en as surement rien à foutre des mecs qui font de la video mais je le dit quand même.
LE PROBLEME donc c’est l’amateurisme et pas le numérique qui permet à ces même amateurs de commettre l’irréparable pour pas un rond, c’est ce qu’on peut appeler « la démocratisation des moyens de production culturels »
Je crois que je suis royaliste en fait.


Pour le fun

« Le devoir consiste à faire de son mieux ce que l’on est fait pour faire. Si tu n’es fait pour rien alors tu n’as pas de devoir.»
Paul Valery, oeuvres tome 3

«Les vertus se perdent dans l’interet comme les fleuves se perdent dans la mer.»
La Rochefoucault

Frozen Piglet a dit…

Les mecs qui font de la video, c'est un peu comme mes cousins, sauf quand ils se foutent devant moi comme si je n'existais pas.
Là, j'ai envie de les buter. Mais je suis assez arrangeant.
Pour le reste j'adhère à tes propos et je te signale que la cinquième république est royaliste de droit divin. Ça c'est sûr.

Unknown a dit…

Le problème n'est pas le numérique, photo ou vidéo.
C'est que les outils sont devenus tellement performants que le quidam, le financier a l'impression que c'est plus un métier de savoir les utiliser.
Alors, leur réflexion est d’une simplicité: pourquoi utiliser ses grognons, qui en plus ont des exigences de qualités, de conditions de travail, de rémunération.
Je peux moi faire la même choses, cela ne mérite pas leur exigence !
Un numéro de carte de presse a cinq chiffres et sans six


Bravo pour ton blog

Frozen Piglet a dit…

Merci pour ton commentaire illustre inconnu,
Mais je confirme, ma carte de presse a 5 chiffres, dont 3 fois le chiffre 6 dans son numéro
et je l'ai depuis très longtemps.
De plus, cela fait longtemps aussi que les cartes de presse sont passées à 6 chiffres pour la bonne raison que ton numéro de carte est à toi pour la vie.

Anonyme a dit…

Alors la, d'habitude je te suis vraiment, mais la tu es complètement à coté de tes pompes.
Pour être clair, mon pauvre qui veut son petit salaire la journée à 300 boules la journée, parce qu'il y a sa petite agence qui le suit derrière, pour avoir sa petite retraite
Mes mon gars à ce prix là quand tu es "artiste/auteur" que tu sembles dénigrer, je préfère rester chez moi à regarder Netflix.
Tu vois tu as de la chance, 300€ pour toi, mais moi c'est 1000€ la journée, sinon je suis mort, alors tes petits états d'âme pour faire semblant, tchao...
( je connais bien le monde des agences puisque je travaille souvent avec Ludo, Eliot, Marc, Fred et bien d'autres)
Comme tu aimes nous rappeler avoir la carte de presse à tous tes com, comme si ça rendait intelligent, j'ai de gros doutes maintenant.
En plus dénigrer les photographes qui parlent Urssaf, droit d'auteur, ben ouais c'est justement ce que t'essaye de faire avec tes petits 300 balles par jour. Mais comme toi tu veux juste du salaire, pourquoi tu te fais pas fonctionnaire derrière un burling, bref tout ce que tu critiques mais que tu jalouses.
(Je n'avais jamais répondu a qui que ce soit sur le net, il faut bien une première fois)

Anonyme a dit…

Oui bonjour à toi aussi,
En France, le salariat est la norme. Que cela te plaise ou non.
Tous les mecs qui passent leur temps à nous expliquer que leur statut d'indépendant est béni de dieux me font rire.
C'est un génération perdue.


FP

Netflix, à de rare exceptions, c'est de la série B,C,D,E + des merdes

Anonyme a dit…

Vous êtes tous des connars

STEVE

Related Posts Plugin for WordPress, Blogger...